[Appartement des Jenkins] Un nouveau départ

Un nouveau départ


18h. C'est ce qu'indiquait mon réveil lorsque je sortis de mon sommeil. Encore une de ces journées agitées où mes rêves s'étaient transformés en cauchemars... Les visages de Ray, des enfants... Et puis ceux de mes anciens amis : Jean, Ash, James. James... Etait-il vraiment mort ? Ou s'agissait-il encore d'une fausse disparition, comme nous commencions à en avoir l'habitude ? Je n'aurais su le dire... Et qu'en était-il pour Batiaque ? Sa mort lors d'une fusillade ressemblait bien plus à un suicide qu'autre chose... Depuis l'assassinat de Jane, de toute façon, il n'avait fait que sombrer. Quoi de plus étonnant à cela ?

Et puis il y avait aussi le visage de Malcolm Dulac. Je l'avais si peu connu que j'avais préféré le laisser se sacrifier plutôt que d'attaquer Ash. Qui sait si je n'aurais pas mieux fait de tirer sur Ash ? Surtout maintenant que j'en sais plus sur sa vraie nature... J'étais certaine que la mort de Dulac me hanterait pendant le restant de ma non-vie. Ca, et ce fléau de Yu. Depuis que j'étais arrivée à New York, je n'avais plus que cette idée en tête : la retrouver pour parvenir jusqu'à son maître. Et les tuer tous les deux. Alors, je pourrai profiter tranquillement de ce qui me servait à présent de vie...

Mais l'heure n'était pas encore venue. Pour le moment, j'avais des choses plus importantes en tête : le Seigneur Vitaly voulait que j'assiste à mon premier Elysium, mais il ne m'avait dit ni quand ni où. Il fallait que je le contacte. Car ce serait peut-être le moment d'en apprendre plus sur les vampires qui hantaient cette ville. Et peut-être aussi sur cette mystérieuse nomade asiatique qui passait dans le coin de temps à autre.

Je me levai et m'étirai : Guy dormait encore. Il avait dû veiller plus tard que moi, comme d'habitude. Encore une des choses qui m'horripilait dans ma condition vampirique : être contrainte par les horaires de lever de soleil... Quelle poisse pour quelqu'un qui, avant, ne comptait pas ses heures !

Un petit tour dans la salle de bain pour me rendre présentable et défaire au maximum cette coiffure, élégante certes, mais que je n'avais pas choisie, et que mon Sire m'avait imposée lors de l'Etreinte. Je ne supportai plus de la voir à chacun de mes réveils. Un brin de maquillage et je sautai dans mes vêtements. Jean et pull-over, comme toujours.
Tandis que Guy continuait à dormir, je me rendai à la cuisine et attrapai mon téléphone portable au vol. Je composai le numéro de la secrétaire de Vitaly et attendait qu'on veuille bien me répondre...

… Jean raccrocha. La conversation n’avait pas été bien longue. "Une voiture va venir vous chercher madame Jenkins" lui avait froidement annoncé la standardiste. Apparemment, le seigneur Vitaly souhaitait la voir au plus vite. Tous les messages qu’on lui faisait parvenir étaient toujours d’une urgence capitale d’après les coursiers. Le vieux vampire semblait angoisser tous ses subordonnés. Pourtant, depuis qu’elle le connaissait, Vitaly était toujours d’un calme olympien lors de leurs rencontres. Leurs rendez vous étaient nombreux, d’une fréquence hebdomadaire au minimum, et ce depuis plus de quatre mois. Malgré tout ce temps, Jean était encore incapable de cerner l'homme qui lui servait de "père" dans sa non vie, alors qu’elle avait l’impression que celui-ci lisait en elle comme dans un livre ouvert.

Son ancien métier oblige, la dernière fois que Jean était avec son tuteur elle avait tout de même su discerner de l'anxieté dans ses yeux, lorsqu’il avait évoqué l’Elysée à venir. Elle en saurait plus quand elle se trouverait à l’Université Columbia, le principal refuge de son maître et de l’Ordo Dracul.

Tandis que Jean faisait les cent pas, Guy s’empressait de se préparer. Quel doux réveil venait-il encore de vivre. Il n’y a même pas six mois de ça, il n’aurait jamais cru qu’un tel plaisir était possible. Il ne connaissait aucune sensation aussi intense que celle du Baiser, si ce n’est peut-être quand c’était lui qui s’enivrait de Jean. Car toutes ces émotions étaient encore décuplées vu qu’il les partageait avec la femme qu’il aimait. Il s’était toujours reproché de l’avoir laissé partir. Dorénavant il était comblé. Il n’en oubliait pas moins la vérité sur leur situation. Les sacrifices auxquels ils furent contraints, les tourments qui hantaient Jean et tout le reste, sachant qu’il y aurait sûrement d’autres épreuves à traverser. Les problèmes allaient de pair avec leur nouvelle vie. Mais Guy était plus confiant que jamais. Certes Jean n’était plus humaine mais à ses yeux elle n’avait pas changé, elle était toujours celle dont il était éperdument amoureux aujourd’hui encore. Ensemble, ils pouvaient tout traverser. Il lui semblait que plus les difficultés s’amoncelaient sur leur chemin, plus leur relation s’épanouissait.

Au début, la "morsure" de Jean affaiblissait Guy, à l’instar d’une prise de sang. Désormais elle l’électrisait ! Il était fin prêt, doté de son gilet pare-balles et de son glock pour parer à toutes éventualités, quand on sonna. La voiture était arrivée.

Le mystérieux couple partit pour l’Université Columbia…

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